S’il est une chose que je retiendrai longtemps de ces vacances, c’est bien la visite des grottes de Lascaux. Que ne donnerais-je pas pour entrer dans la vraie et voir les traces de doigts colorées que des hommes préhistoriques ont apposés sur ces murs il y a des milliers d’années…
Un brin d’histoire
La découverte de la grotte a été une suite de hasards parfaits : une tempête qui déracine un arbre qui crée une ouverture d’une vingtaine de centimètres, juste assez pour faire passer un lapin et pour piéger le chien de Marcel Ravidat le 8 septembre 1940. Il le sort de là et comprend qu’il y a une grotte là-dessous. Habitant la région, il sait que de nombreuses cavités pré-historiques ont déjà été découvertes et revient quelques jours plus tard avec 3 amis (un de la région et deux vacanciers) : Jacques Marsal, Georges Agniel et Simon Coencas (Simon est toujours en vie et revient en pèlerinage sur les lieux chaque année).
Ils descendent tous les quatre dans la grotte qui n’a plus été ouverte depuis environ 18 000 ans (vous vous rendez compte?) et sont tant absorbés par la découverte de la longueur de la cavité qu’ils ne remarquent pas les plafonds ornés. C’est en tombant en arrière dans un couloir qu’un des quatre compères lève la tête malgré lui et tombe nez à nez avec une peinture de vache rouge immense.
Ils courent chercher leur professeur, spécialiste de l’art pariétal, l’Abbé Breuil qui réagira en scientifique (de l’époque) et exécutera les premiers dessins et croquis des parois.

Le préhistorien et Abbé Henri Breuil (3e à droite) dans la grotte de Lascaux
Les quatre jeunes amis organisent alors les visites et dorment sur place pour protéger l’entrée. Dommage qu’il n’aient pas également penser à protéger la grotte elle-même car la surfréquentation donnera lieu à trois maladies : blanche, verte et noir. Deux d’entre elles sont résolvables (blanche et verte) mais la dernière détruit littéralement la peinture et, ce qui disparaît n’est pas remplaçable. Le 18 avril 1963 (soit 23 ans après la découverte), le ministre en charge décide de la fermeture de la grotte. Tout l’électronique mis en place depuis des années pour tenter de la sauver est retiré, plus de ventilation, de caméras, juste des senseurs pour faire les relevés de températures et d’humidité.
Aujourd’hui, seuls quelques scientifiques ont l’autorisation de rentrer dans la grotte et d’y rester quelques minutes par mois (ou par an?). Il faudra encore quelques dizaines d’années avant que la grotte ne retrouve un semblant d’équilibre naturel mais les spores étant présents, aucune réouverture n’est possible car le moindre changement relancerait la production des champignons.

L’entrée de la vrai grotte de Lascaux
La région est classée au Patrimoine Mondial de l’Unesco et comptabilise 25 grottes ornées (de quoi faire plaisir aux historiens parmi nous).
Un (tout petit) peu de préhistoire
Loin d’être en lien avec une quelconque religion (il n’y a pas traces de dieu vénéré à cette époque), ces peintures remplissaient différentes fonctions comme par exemple ces deux bisons qui expliquent aux nouveaux venus dans la région, le déroulement des saisons et les périodes les plus propices à la chasse de ce gros animal : lors de la mue (quand ils sont plus faibles) et lors de la parade amoureuse (quand ils sont plus occupés à autre chose, si vous voyez ce que je veux dire).

Le bison rouge est en mue, le bison noir en parade
Vous trouverez des scènes d’animaux qui sont encore sujettes à discussion dans le monde scientifique. Ces chevaux s’enfuit-ils de la grotte pour rejoindre le monde des esprits? Est-ce une représentation des mouvements migratoires? Nous ne savons pas (et je ne sais pas si un jour nous saurons) ce que ces hommes ont voulu représenter et pourquoi.
Un élément qui m’a particulièrement touchée dans cette visite c’est la découverte que ces croyances (ou cet art) ont fait bien plus long feu que les religions qui ont suivi dans l’histoire de l’Homme. On retrouve des peintures rupestres témoignant d’un même élan (mais pas d’un même style car chaque tribu a sa patte et sa manière de représenter les animaux) depuis –26.000 BC jusqu’à notre ère (donc depuis environ 28.000 ans, vous vous représentez la chose?). Plus que cela, les hommes laissaient dans les grottes pour les suivants de quoi continuer la peinture, de quoi s’éclairer, de quoi construire les échafaudages sans savoir quelle tribu viendrait, ni quand. Les hommes avaient une vision plus longue du temps et de la transmission que nous. Peut-être est-ce dû au fait que leur vie humaine était plus courte que la nôtre et qu’ils ressentaient plus que nous le côté éphémère de leur passage sur Terre? Quoi qu’il en soit, je reste estomaquée par l’éternité qui se lit sur ces dessins et dans ces grottes.
Lascaux II : le premier fac-similé d’une grotte
Pour ceux qui ont visité Lascaux IV, cela n’a rien à voir. Vous vous retrouvez ici dans une cavité qui existait réellement à la base et non pas une attraction touristique à la Disneyland dans un bâtiment construit de toutes pièces.
Vous ressentez le froid et l’humidité propre à une grotte et cela participe beaucoup à l’expérience.
Le fac-similé a été réalisé en 1983 et reprend les deux galeries les plus célèbres : la Salle des Taureaux et le Diverticule Axial, reproduisant Lascaux à l’identique et avec une précision impressionnante vu qu’ils n’avaient pas accès à la vraie grotte.
Les peintures ont été réalisées par des artistes qui ont reproduit les mêmes techniques et utilisé les mêmes pigments que les Homo Sapiens. Quelque chose qui m’a touchée puisque, même si ce ne sont pas les doigts des hommes d’il y a 18 000 ans, ce sont malgré tout des artistes, des hommes avec leur sensibilité qui ont donné une âme à cette reproduction. Quelques chose de magique se dégage de tout ça.
Saviez-vous que le terme de Cro-Magnon vient du fait qu’un squelette d’Homo Sapiens a été retrouvé dans un ceux (cro en occitan) sur le terrain de monsieur Magnon (#truestroy)?
La visite de la grotte
Concrètement, la visite commence par une introduction sur la découverte de la grotte et des acteurs principaux, suivi d’une montée dans la forêt jusqu’à l’entrée de la vraie grotte (la vraie de vrai). On descend ensuite dans le fac-similé où une première salle nous accueille pour nous mettre dans l’ambiance. Il y fait sombre et on y apprend un peu plus sur les maladies qui ravagent Lascaux, les moyens mis en oeuvre pour la sauver et où l’on découvre les bisons dont je vous ai parlé plus haut.
Ensuite nous faisons notre entrée dans la grotte dans le noir total (vraiment un noir complet) pour revivre la découverte de la grotte comme les 4 compères l’ont vécue. Nous suivons la guide avec une lampe de poche, sa voix raisonne dans la cavité, les peintures sont accrochées au plafond et la lumière vacillante les fait pratiquement prendre vie. Tout se passe dans le plus grand silence, en partie parce que la guide l’a demandé et en partie parce que nous sommes tous subjugués par ce témoignage des hommes du passé.
Nous avons littéralement 3 minutes pour prendre des photos avant de continuer la visite et de suivre la guide nous montrer les particularités de cette grotte.
Ce que j’en ai pensé
Comme l’introduction vous l’a surement fait comprendre : j’ai adoré. C’était un moment très émouvant (à peine gâché par le fait que ce n’était pas la vraie grotte) et accompagné par une guide extraordinaire pour rendre la chose encore plus incroyable. J’ai particulièrement apprécié que la guide en connaisse un rayon sur le sujet et ne se contente pas de nous raconter l’histoire de la grotte ou comment lire les peintures mais nous en apprend plus sur le sujet général et sur les théories qui circulent pour l’instant dans le monde de l’archéologie.
Vous serez estomaqués par les choses que l’on ne vous a pas apprises en primaire (époque où l’on aborde cette période de l’Histoire) comme l’existence de points noirs et rouges dans la grotte dont l’utilité est encore controversée (un guide pour lire la grotte? les points de rendez-vous pour une meilleure acoustique pendant les réunions du clan?), la présence également de figures géométriques qui s’apparentent à des signatures ou des contrats selon des tribus d’Afrique qui utilisent encore aujourd’hui l’art rupestre dans leurs croyances.
Je n’ai pas ressenti de sentiment de trop peu en sortant de ces deux cavités bien qu’a posteriori, j’aurais aimé voir l’ensemble des murs peints (il y a 7 salles peintes dans Lascaux I) mais malheureusement, il n’existe aucun autre moyen que d’aller voir les originales qui resteront cachées aux yeux du monde pour un bon bout de temps (voir pour toujours).
Infos supplémentaires :
- adresse : Lieu-dit Lascaux à Montignac
- site internet : https://www.lascaux.fr/fr/contenu/8-lascaux-ii
- Facebook : LascauxOfficiel
- Instagram : lascauxofficiel
Une réflexion sur “Visite de Lascaux II : un voyage dans le temps”